> Une vision sur les forêts françaises présentée par l’ingénieur forestier Sylvain Angerand

Le discours ambiant semble dire que nos forêts françaises se portent à merveille – ce n’est pas ce que nous dit Sylvain Angerand, ingénieur forestier qui se passionne de longue date pour la défense des forêts, dans un entretien podcast chez Greenletter Club

forêts françaises -Sylvain Angerand

Une vision sur les forêts françaises présentée par l’ingénieur forestier Sylvain Angerand, voici les principaux messages résumés ici >

+ Les forêts européennes ou françaises s’agrandissent, oui mais sont-elles en bonne santé ?

+ La déforestation ne reflète pas une réalité française, mais pourtant les régions du Morvan ou de la Dordogne sont par exemple un « carnage »

+ Le sujet n’est pas la déforestation mais plutôt le remplacement de forêts semi naturelles et diversifiées par de plantations monocultures et de résineux. Ce problème ‘qualitatif’ est difficile à quantifier

+ La forêt a historiquement gagné du terrain d’un point de vue quantitatif ; plusieurs raisons : l’urbanisation, la déprise agricole,  la plantation du fonds forestier

+ Le problème est qualitatif, seul 18% des forêts sont dans un bon état/ en bonne santé

+ L’engagement 2010 de la France sur la biodiversité n’intègre pas la vision forestière

+ Plusieurs visions entre un modèle très productiviste, la forêt comme une agriculture (engrais, pesticide, coupe jeune/fertilité des sols) et le modèle de la forêt comme un écosystème en lui-même sans besoin d’intervention humaine ou de plantations ; la forêt n’est pas une agriculture

+ Excluant la région des Landes (monoculture historique de pins..), 30% de la forêt est issu de la plantation, mais la plantation n’est le critère de qualité, car elle peut être utile

+ Le problème est que ces plantations sont essentiellement des résineux, pour raison économique. La forêt française est aujourd’hui 2/3 de feuillus et 1/3 de résineux plutôt en montagne.

+ La France semble avoir un complexe d’infériorité avec l’Europe du nord, leur forêt de pins très standardisée normalisée, et donc plus économique à produire

+ Une concentration des scieries françaises sur le résineux, créant ce type de demande; disparition des scieries plus petites traitant les feuillus, chênes, hêtres ou autres

+ Tension entre la filière et la forêt, provoquant un remplacement de nos forêts en résineux (douglas dans le sud, pins maritimes sur la façade atlantique)

+ Les résineux poussent plus vite, cependant leur production n’est pas forcément plus économique ; problème de  sylviculture « régulière » (monoculture de même âge), appauvrissement des sols avec coupe toutes les 50 ans, perte de biodiversité des forêts plus âgées

+ 80% de la forêt a moins de 100 ans aujourd’hui, alors que le « climax »d’une forêt est 500 à 1000 ans ; la biodiversité est permise au-delà de 200 ans, hors la filière pousse pour raccourcir  l’âge de ses forêts de 100 ans à 50 ans ; un contresens pour la biodiversité et le climat (réduction du puit de carbone)

+ Problème des scolytes sur les épicéas, un arbre de montagne planté en plaine, créant un déséquilibre accentué par les scolytes

+ Les scolytes sur des dizaines de milliers d’hectares, provoquant pins séchés ou dépérissement du sapin ou des hêtres ; problème d’adaptation forêt

+ 2% de la forêt en dépérissement à traiter auquel se rajoute le danger du remplacement souhaité de la forêt mal adaptée comme les forêts en taillis ou taillis sous futaie représentant 40% de la forêt, et poussée à être rasée plutôt que traitée intelligemment (balivage) > la coupe rase est un drame (Morvan)

+ Les oiseaux ne sont pas les plus impactés (à part les pics), cependant le risque est de voir des régions à faible biodiversité (insectes..)

+ La coupe peut être utile, mais en préservant une forêt diversifiée en libre évolution ; pas de forêt sous cloche

+ La forêt est à 75% privée ; le combat est mené contre la fédération des propriétaires forestiers (Fransylva), « prétendant » représenter 3,5 mln de propriétaires, son président Antoine d’Amécourt est « juge et parti , faisant la politique et la mettant en place »

+ « Un débat fermé à l’instar de Michel Druilhe  chez France Bois Forêt, refusant de dialoguer, ne se sentant peut etre pas à niveau des enjeux climat »

+ Sur la forêt publique (ONF : Office National des Forêts), 25% des forêts, la pression des besoins en financement pousse à l’exploitation de ces forêts

+ L’exploitation des forêt en France le sont en 1) bois d’œuvre / construction, et 2) bois d’énergie

+ Prenant en compte les enjeux climatiques aujourd’hui, la forêt ne peut pas remplacer les fossiles ; la forêt est renouvelable sans être illimitée, hors la demande globale sur les fossiles est aussi croissante

+ Le bio carburant à base de bois ne peut pas fonctionner (huile de palme déjà interdit)

+ Surtout que la forêt doit aider à réduire les émissions CO2 comme un puit de carbone, ce qui n’est pas possible avec des forêts jeunes ou de plantations ; le gouvernement n’intègre pas cette donnée, : ne pas réduire la forêt au moment le plus pressant (urgence climatique)

+ Hors le bois énergie, encore minoritaire par rapport au bois œuvre, s’en rapproche

+ Exploitation bois vertueuse > la partie noble du tronc pour le bois d’œuvre, le houppier ou les grosses branches pour le bois énergie, et les fines branches doivent rester sur place, essentielles pour la fertilité des sols

+ Aujourd’hui une déformation de l’exploitation vertueuse > de plus en plus de bois d’œuvre en bois énergie, pour une question de rentabilité (usine Biosyl dans le Morvan), ramassage des fines branches avec les broyeurs

+ Aussi de nouvelles usines biomasse en France créent une forte pression pour transformer la forêt en granule /énergie

+  Européenne de biomasse, la centrale de Gardanne, ancienne centrale à charbon (capacité : 800 mille m3 de bois, l’équivalent 470 km de forêt autour de Gardanne)

+ Une pression déjà vue au Royaume uni avec la centrale de Drax, dotée d’une capacité pouvant absorber plus de bois que le pays ne peut en produire ; import des USA menant à sa population mécontente

+ La centrale Gardanne en France importe du Canada ou du Brésil, notamment de l’eucalyptus planté (arbre de la soif), asséchant les sols menant à des conflits sociaux

+ Exemple de l’usine Albioma, en France d’outre-mer, ancienne centrale à charbon en biomasse alors que le territoire ne produit aucun bois

+ Le bois n’est pas neutre en carbone ; le bruler émet plus de CO2 que le charbon ; il repousse mais sur un temps plus long que donné par l’urgence climatique ; une forêt exploitée risquant de ne plus repousser à cause du réchauffement

+ Trop couper la forêt, c’est “tuer notre assurance vie” ; pourtant les €500 millions de subventions publiques au bois énergie sont mal orientés

+ Baisse probable à venir du volume de bois pour 1er fois depuis le 19ème siècle en France

+ 400 mille emplois pour filière bois en France, une filière mal structurée, pas de grandes multinationales, mais concentration du pouvoir (Fransylva)

+ Un regroupement de coopératives (Alliance Forêts Bois) avec son extension géographique de sa politique de coupe rase, exportant son modèle de sylviculture dans un conflit d’intérêts (travaux, gestion…)

+ La coupe rase de feuillus pour planter une monoculture de pins est un scandale

+ Pression sur le bucheron devenu entrepreneur surendetté avec son abatteuse à €1mln

+ Nos politiques jouent sur l’effet de substitution, préférant le bois à l’acier sur le plan des émissions/consommation énergétique, y compris dans la construction

+  La demande croissante est le problème qui doit nous pousser à repenser nos usages / réduire notre consommation

+ La compensation carbone actuellement à la mode ne repose sur aucune base scientifique ; problème du décalage dans le temps entre les replantations et l’urgence climatique

+ Une forêt bien gérée n’a pas besoin de plantations ; elle doit vieillir pour être viable ; la forêt c’est le temps long

Sylvain Angerand, ingénieur forestier et responsable de campagne au sein de l’association Canopée, est co-auteur du rapport “Gestion forestière et changement climatique”. Il est coordinateur des campagnes de Canopée une association française, membre de la Coalition mondiale des forêts, spécialisée dans le plaidoyer pour la défense des forêts, en France et dans le monde. Cette nouvelle organisation environnementale a été fondée en 2018.

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